Foire aux santons d'Arles et 60ème Salon International des Santonniers
Publié le 9 Novembre 2017
Le 60ème Salon International des Santonniers d'Arles
60 ANS ! Pour le Salon International des Santonniers ce n'est pas, et ce ne le sera jamais, l'heure de prendre la retraite.
Soixante années d'amitié, de confiance, de fructueux échanges, avec les santonniers professionnels comme avec les créchistes amateurs. 60 ans sans nuages, toujours avec un horizon clair et prolifique : faire connaître cet art santonnier si particulier a notre pays La Provence ; promouvoir ce savoir faire exceptionnel de la Russie au Canada et au Québec, des Etats-Unis au Japon comme dans tous les pays d'Europe, avec des expositions, des conférences, des échanges... Mais aussi en France dans les lieux les plus prestigieux comme la Cathédrale Notre Dame de Paris, Les Baux, Locronan, Morlaix....
Ainsi LA SOIXANTIEME édition de cette institution est plus que jamais dynamique, surprenante, riche, rare, et un panorama complet, unique, de cet art populaire emblématique de Provence.
Reflet d'une profession et des talents qui réunissent en Provence un peu plus de 200 professionnels réalisant un chiffre d'affaire d'environ 10 millions d'euros, pour 700 000 figurines santons et crèches vendues par an, représentant aussi plus d'un millier d emploi. Mais aussi des artisans ambassadeurs de notre Région et de la France dans de nombreux pays où les Santons Provençaux sont particulièrement appréciés.
Siège et vitrine de ce métier qui conserve son savoir faire artisanal du travail de l'argile, le Salon d'Arles est leur maison, telle qu'ils l'ont voulu et créée en 1958 pour être leur domicile artistique;
Dans ce lieu exceptionnel qu'est le Cloître Saint Trophime, en plein cœur de ville, cette 60ème exposition vous invite à découvrir plus d'une centaine d'exposants dans sept espaces thématiques dédiés à l'art de ces artisans du bonheur dans cette joyeuse période Calendale (Noël).
-Attitudes et couleurs, l'évolution du santon vers le mouvement et les couleurs,
-Les jeunes artisans artistes de cette profession; la nouvelle génération,
-Les drôles de crèches, interprétation décoiffante .
-La crèche source d'inspiration artistique universelle dans le genre comme dans les matériaux
-L'interprétation design de cet art traditionnel
-Les œuvres des Santonniers professionnels, et des créchistes amateurs
-La très grande crèche de Lise Berger 7m X 4m scénographie d'Arlette Bertello, création 2017.
-Le Concours de création professionnels et amateurs.
-Le thème de l'année, qui est obligatoire pour le concours, mais facultatif pour l'exposition, est un personnage très particulier : les gitans
-Les pays Européens
Arles occupe ainsi une place centrale, fondamentale et incontournable sur la planète des Santons avec :
Le Salon International des Santonniers,
Les artisans qui y sont installés : Henri Vezolles, les santons Filippi, Evelyne Ricord Meilleure Ouvrière de France, Elisabeth Ferriol.
Les très grandes crèches de la Major, de l'ancienne cathédrale St Trophime et des Saintes
Le musée des santons Conservatoire des santons de Provence,
Le grand concours de crèches et de création du hameau de Salin de Giraud,
Un très grand nombre de créchistes amateurs,
Philippe Brochier et toute l'équipe du Salon International des Santonniers Guy et Jeanine Aubert, Arlette Bertello, Annie Bobbia, Michèle et Pierre Bouchet, Guy et Michèle Bourillon, Dorota Brochier, Daniel Ferrier, Gérard Gonzalez, Yvan Marin, Michel Pellegrino, Noël Portalès, Gaetano et Martine Pozzati, Guy Rouvière, Henri Vezolles.
TRUFFIER DOUZON
L’histoire de cette famille exceptionnelle débute en 1795 avec la naissance de Joseph Marius Truffier fondateur d'une dynastie qui célèbre maintenant ses 2 siècles d’artisanat santonnier !
La famille Truffier est issue du village de Quinson dans les Basses Alpes. Joseph est le fils du maire de Quinson Joseph Truffier. Il a plus de 10 frères et sœurs et bien que la famille soit propriétaire de terres, il semble que Joseph ne se soit pas tourné vers l’agriculture.
Depuis le XVIe siècle il existe à Quinson une confrérie de La crèche, héritage des Oratoriens et Franciscains qui ont apporté la tradition de faire la crèche en Provence. Joseph Marius était membre de cette confrérie.
Nous n’avons pas d'autres traces de Joseph à Quinson hormis sa date de naissance. On le retrouve à Marseille au début des années 1820 avec sa participation à la foire aux santons de Marseille.
Que s’est-il passé entre son départ de Quinson et son arrivée à Marseille ?.
Joseph a quitté Quinson soit par choix soit par nécessité économique, plus de terres, pas d’héritage ? Volonté de faire autre chose ?
On ne peut dater que très approximativement le début son activité, fixée par certains historiens entre 1815 et 1820, et il se serait spécialisé dans les santons détachés. D’autres textes affirment qu’il a réinventé le personnage de Bartoumieu et aurait ainsi obtenu la 1ère récompense octroyé à un santonnier ?
Son fils Louis Joseph, né en 1825 a Quinson Basses Alpes, est paveur mais il continue cependant l'activité santonnière. Il épouse la fille du journalier et santonnier Jean Joseph Blanc (Manosque 1801) Louis-Joseph Truffier est aussi, comme son père, plâtrier, et fabrique au moment de Noël des santons que sa femme vend à la foire aux santons de Marseille. C’est un personnage simple , assez obscur, travaille beaucoup, il a deux fils. Louis Joseph fera quelques foires aux santons puis part s’installer à Lurs dans les Basses Alpes. Le représentant de la 2ème génération s’éteint en 1879 à Marseille.
Le mot santonnier n’existe pas au XIXe siècle. Ceux qui les fabriquent sont statuaires ou plâtriers toute l’année et confectionne pour la fin d’année des santons qu’ils vendent à la foire de Marseille.
Aubin Joseph (1859 -1934) dit Urbain reçoit le métier naturellement de son père et de son parrain de baptême François Gritty figuriste de métier. Selon Elzéard Rougier il aurait participé à la foire de Marseille dés 1870 soit à 11 ans. car il aurait bénéficié d'une dérogation pour remplacer son père parti à la guerre. En plus de son atelier de santon il dirige l'entreprise familiale de pavage et aurait ainsi réalisé une grande partie du pavage des rues de Marseille.
Aubin/Urbain Truffier a eu ce qu'on nomme une vie dissolue... L’argent, les femmes et le jeu auront raison de sa réussite sociale et de son 1er mariage.
5 enfants tous santonniers : Joseph Marius (1877- 1949) et Marius (1881 - 1934) du premier mariage. Ensuite Georges, Joseph (1916 - 1990) qui a participé au 1er Salon International des Santonniers d'Arles en 1958 et qui a été président du Syndicat des Santonniers, Alexandrine dite Micheline épouse Kilgus installée à Chateauneuf les Martigues.
Joseph Marius (1877 - 1949) est le plus prolifique des santonniers.
Il est très proche des Félibres et participe aux Pastorales qui se jouent dans le théâtre de son père.
Il va enrichir des personnages des pastorales la collection de moules de la famille. Le pécheur et la poissonnière, l’Arlésienne, Tartarin sont les santons que crée Marius en symbiose avec le mouvement Félibréen et celui des pastorales qui se jouent à Marseille.
En 1899, la Pastorale de Lucien Foucard se joue au théâtre Chave pour la 1ere fois. C’est Joseph-Marius qui est sur scène !
Frédéric Mistral ou Elzeard Rougier chantent les louanges des santons et de leurs créateurs, il est devenu un objet identitaire fort et une tradition régionale unique en France.
Le santon est le souvenir d’enfance commun à tous les petits provençaux.
Peu à peu les artistes font connaître les santons et la crèches dans le reste de la France : des baraques sont montées à Paris dans les années mille neuf cent vingt, des expositions aux Arts décoratifs y ont lieu.
C’est Joseph-Marius qui crée les modèles et les moules de tous les nouveaux personnages.
En plus des personnages bibliques, des petits métiers urbains qu’on crée Louis-Joseph c’est lui qui invente le Bartoumiou, et tous les personnages emblématiques de La Provence des félibres qui sont aujourd’hui nos personnages classiques de la crèche.
Fantasque, comédien à ses heures, Joseph-Marius est le plus gentil et attachant des Truffier.
A sa mort le métier de santonnier est créé ! C’est en effet, sur le registre de décès de Joseph Marius qu’apparait pour la première fois le mot santonnier !!!
Et en 1902 un autre Urbain Truffier naît, qui deviendra la figure emblématique de la famille. C'est le fils de Joseph (1877 - 1949). Très jeune il reprend le métier familial en travaillant avec son père, et pendant la guerre de 14/18 qui a mobilisé de très nombreux santonniers il tient avec son père et les autres artisans trop vieux pour faire la grande guerre les cabanes des absents.
Urbain le 2ème, invente et commercialise la "crèche en colline" éclairée par une guirlande, crèches en liège et en carton enduit et peint. Il a ouvert la voie aux crèches actuelles et créé vers 1930 l'atelier baptisé : Les Rois de la crèches au 12 rue de l'étoile à Marseille. On y trouve des santons peints en plusieurs tailles et de nombreuses et différents modèles de crèches.
Urbain va créer de nouvelles séries de santons peints, faire une série art déco, fabriquer la série de santons 5, 7 9 cm toujours utilisé ! Il achète un des premiers fours potiers. Avant on ne cuisait pas les santons, ils étaient en argile crue, séchée.
Urbain a de multiple talents : santonnier à temps partiel, projectionniste de films à l’époque où les cinémas de Marseille remplacent les théâtres, taxi une grande partie de sa vie. Il va aussi tenir quelques saisons le bar et la terrasse des Marronniers.
Santonnier n'est toujours qu'un travail saisonnier de septembre à janvier, un complément de salaire. Le reste du temps tous les santonniers de la foire de Marseille ont un autre travail.
Il n’existe alors que la foire aux santons de Marseille, Urbain a 3 baraques dont une à sa mère, une à sa fille, puis une autre à sa petite fille.
Sans compter la baraque de Georges, Joseph et Alexandrine Kilgus ses oncles et tantes. Ce sont des baraques de 10 m de long, une pour les crèches, une pour les santons, une pour les accessoires.
On peut compter jusqu’à 10 baraques Truffier sur la foire à Marseille selon les années !
C'est encore Urbain qui va renouer avec les Basses Alpes et en se rendant à Quinson origine de la famille, il découvre Gréoux ou il viendra régulièrement en vacance à partir des années 1930. Après la guerre de 39/45 il fait construire une maison et plus tard les descendants dans les années 1970 y installent un atelier qui est aujourd'hui le centre principal de l'entreprise.
Avec Elise Josette (1927 - 1992) fille unique de Urbain c'est la 1ère femme santonnière de la famille, celle aussi qui apporte un second nom aux Truffier en épousant un Douzon.
Elle travaille avec Urbain son père, et Henri son mari tous deux ayant été ormés à l'école du papa Urbain et du grand père Joseph. Josette peint avec beaucoup de goût et de talent, Henri révèle un grand talent pour les crèches.
Josette, Henri et Urbain a être saisonnier, santonnier et taxi.... Et lorsque la famille viendra s'installer à Gréoux Josette prend en parallèle avec les santons un emploi aux thermes.
Leur fille Jeannine Douzon assure la succession.
Jeanine Urbainne Douzon (1947 - ) c'est la 7ème génération. Elle apprend le métier avec son grand père Urbain et ses parents dans l'atelier familial. Très douée pour la peinture elle crée en 1965 les premiers santons habillés de la dynastie Truffier Douzon et développe avec succès le métier familial dans les années 1970.
Très entreprenante et dynamique elle installe la 1ère grande crèche provençale à New York sur la 5ème Avenue dans la vitrine de la Maison de France. Aujourd'hui Conseillère Régionale PACA elle épaule son fils Jérôme qui dirige désormais la maison Douzon Truffier.
Avec Jérome c’est la 8ème génération qui est aux commandes de la très vénérable maison Truffier-Douzon.
Il y a apporté sa fougue, sa rigueur, et sa vision moderne du métier.
Et pourtant….
« Je voulais être militaire et faire l’école des officiers »
Evidemment dans une famille toute entière dédiée aux santons depuis Joseph (1877 - ) on n’échappe pas a la passion ambiante ! Jérôme finit donc par s’y intéresser un petit peu, surtout grâce a son grand-père Urbain avec lequel il aime monter des crèches en carton enduit et en liège, puis se met à fabriquer des accessoires les plus divers pour les santons habillés.
Élève pas vraiment passionné, il a redoublé la sixième, et arrive au terminus en 4ème. Ce qui l’amènera a faire 3 ans de comptabilité qui lui servent bien aujourd’hui.
A 16 ans il fait ses premiers moules, deux ans plus tard il commence a sculpter, avec Jeanine sa mère, des têtes en argile pour des santons habillés.
C’est dans les années 1967/1968 que son grand-père a créé avec sa fille Jeanine un atelier de santons habillés prospère.
En 1988 Jérôme crée des sujets sur le thème de la Révolution et obtient le label officiel du bicentenaire pour 1989. L’idée est novatrice et fructueuse, mais il n’a pas déposé le brevet d’exclusivité et ses revendeurs se trouvent en concurrence avec les santons Amy qui ont plongé dans cet espace prometteur. Alors même si sur les foires et dans le magasin de Manosque qu’il a ouvert exprès les résultats sont excellents, l’affaire ne sera pas aussi bonne que ce qu’il espérait.
Mais ce n’est pas tout… un incendie criminel détruit le magasin de Manosque ! Moules, santons presque tout est perdu.
Les années 89 et 90 sont les pires dans l’histoire de cette grande maison santonnière.
Courageusement il recommence a créer, et avec sa mère ils refont une série de santons habillés, ce qui leur permettra de reprendre une activité commerciale en juin 1990.
Mais la mode de ce type de santons très prisés jusque là s’effondre peu à peu a partir des années 2000 ! Pour les Truffier-Douzon spécialistes reconnus du santon habillé c’est l’effondrement, la fin d’une époque.
« Il a fallu se remettre en question se rendre à l’évidence et chercher des débouchés avec une reconversion dans les santons en terre . »
Cela se passe dans les années 2004/2005
« Et ça été très dur car la maison Truffier-Douzon n’était pas connu dans ce registre, depuis le décès de Urbain en 1982. Nous avons donc dû repartir de zéro et ressortir les vieux moules. »
Jérôme qui avait créé en 1989, a 19 ans, son premier santon en terre : un Roi de 9 cm se remet a créer des santons sur le thème des métiers en 7 et 9 cm. En 2011 il commence une autre série en 5 et 7 cm. Les premiers sont : une arlésienne, un homme à la lanterne et un jardinier.
Ainsi peu a peu a force de travail de sérieux et de talent, la maison Truffier-Douzon a retrouvé sa renommée.
Aujourd’hui Jérôme toujours fidèle à Gréoux et à la Foire de Marseille, voudrait se développer mais n’y arrive pas faute de trouver du personnel suffisamment qualifié dans les diverses spécialités et notamment pour la peinture. Il veut aussi développer le secteur des accessoires, et celui des personnages emblématiques comme il l’a fait récemment avec Les poilus de 14/18.
« Je pense et souhaite que dans un très proche avenir notre métier doit évoluer :
-Se diversifier, avec plus de qualité de détails d’innovation dans les personnages,
-Conclure le dossier sur l’identité géographique qui donnera un label et une protection pour tous les santonniers et une garantie pour le public,
-Se professionnaliser et monter en gamme. »